Pouvez-vous vous présenter ?
Je suis Martin Désilets, professeur-chercheur titulaire à la Faculté de génie, au sein du Département de génie chimique et de génie biotechnologique de l’Université de Sherbrooke, au Québec. Avant d’entrer dans le monde universitaire, j’ai travaillé pendant une dizaine d’années dans l’industrie de l’aluminium, notamment chez Alcan (devenue par la suite Rio Tinto Alcan après son rachat). J’ai notamment été en poste au LRF (Laboratoire de Recherches des Fabrications) à Saint-Jean-de-Maurienne. C’est aussi l’un des lieux où je vais collaborer pendant mon séjour ici, car j’y ai gardé des contacts professionnels.
Quel est votre domaine de recherche ?
Mon domaine principal est l’électrochimie et je me suis spécialisé dans le stockage d’énergie et le vieillissement des batteries. Ce travail a pris forme dans le cadre d’un projet de cinq ans avec Hydro-Québec, ce qui m’a permis de développer des outils pour diagnostiquer l’état de santé des batteries. Ces recherches s’appliquent à différents types de batteries, allant des véhicules électriques comme les quads ou motoneiges — un sujet exploré avec BRP (Bombardier Produits Récréatifs) — jusqu’aux ordinateurs portables et smartphones.
Je m’intéresse aujourd’hui aux phénomènes de vieillissement électrochimique des batteries, à la caractérisation et le diagnostic de leur état de santé, et à la manière de prolonger leur durée de vie, un enjeu crucial dans le contexte actuel de transition énergétique.
Pourquoi êtes-vous à Grenoble, et pour combien de temps ?
Je suis ici pour un séjour de deux mois, jusqu’à début juillet. C’est ma deuxième visite à Grenoble, mais c’est la première fois que j’y enseigne. Mon séjour est motivé par une volonté de collaboration avec des chercheurs du LEPMI (Laboratoire d’Électrochimie et de Physico-chimie des Matériaux et Interfaces, affilié à l’Université Grenoble Alpes). Nos thématiques de recherche sont très proches, notamment sur le vieillissement des batteries, ce qui rend la collaboration particulièrement pertinente.
Je vais également assurer quelques cours auprès des élèves de Grenoble INP – Ense³, sur le stockage d’énergie, plus spécifiquement sur le volet dédié aux batteries. C’est très enrichissant à l’étranger car nos approches pédagogiques sont différentes mais complémentaires.
Qu’est-ce qui vous plaît dans votre double casquette d’enseignant-chercheur ?
Ce que j’aime, c’est cette « étincelle » que l’on voit apparaître dans les yeux des étudiants et étudiantes lorsqu’ils comprennent ce qu’on explique — ou mieux encore, lorsqu’ils nous apprennent quelque chose. L’enseignement est un échange bidirectionnel : en expliquant, on est souvent confronté à ses propres limites, ce qui nous pousse à progresser. Les outils et technologies évoluent aussi très vite, et les nouvelles générations ont un regard précieux sur leur usage.
Qu’est-ce que ce type d’échange international vous apporte ?
Beaucoup de choses. À l’Université de Sherbrooke, j’ai piloté une réforme pédagogique de grande ampleur. Venir ici me permet de voir d’autres méthodes, d’autres outils, et d’enrichir ma propre pratique. C’est aussi une opportunité de développer des collaborations concrètes — nous réfléchissons avec le service Développement International et Partenarial à la mise en place de mobilités croisées entre nos deux établissements, que ce soit par des semestres d’échange ou des cotutelles de thèse.
En plus des échanges scientifiques, c’est une occasion de mieux comprendre les complémentarités entre nos approches. Ici, à Grenoble, on a les moyens d’aller très loin dans la caractérisation fine des batteries. De notre côté, à Sherbrooke, on est très connecté au monde industriel. Cette complémentarité est un atout. Je ramène aussi une perspective enrichie de l’enseignement, des outils numériques et des pratiques pédagogiques, ce qui bénéficiera directement à mes étudiants et étudiantes.
Souhaitez-vous ajouter un mot de la fin ?
Oui, je dirais simplement que dans nos domaines techniques, la transition énergétique, l’électrification des transports et de l’industrie sont des enjeux centraux. Au Québec, par exemple, nous avons la chance de produire 80 à 90 % de notre électricité grâce à l’hydroélectricité — une énergie propre. Mais cela ne représente qu’une partie de la consommation énergétique globale. Travailler à mieux stocker cette énergie, à mieux gérer le vieillissement des batteries, c’est participer à un changement profond de nos sociétés.